La relation entre tourisme, croissance et développement inclusifs dans les petites destinations insulaires de luxe
L’exemple d’Anguilla dans la Caraïbe
De nombreux pays en développement notamment dans la Caraïbe considèrent que le tourisme est un puissant vecteur de croissance, de développement économique et de réduction de la pauvreté. Cependant, le lien entre tourisme, croissance et développement économique n’est pas un mécanisme automatique, car la croissance est une condition nécessaire, mais non suffisante pour amplifier le développement. La croissance du tourisme peut même comporter des effets pervers et s’avérer en définitive une croissance « appauvrissante » si elle n’entraîne pas un développement inclusif et durable. Autrement dit, cette relation ne peut exister que si le tourisme crée de nouveaux emplois, établit des liens, en particulier avec l’agriculture et l’agro-transformation, avec la pêche, l’industrie manufacturière, les secteurs de prestations de services, et stimule le développement de l’infrastructure de base par la construction en particulier de routes et d’installations portuaires et aéroportuaires, d’équipements divers, etc. Par conséquent, ce lien n’est pertinent que si l’activité touristique engendre de la croissance et développe un effet d’entraînement et de « contagion » sur les autres secteurs d’activité.
Qu’en est-il par exemple dans les toutes petites destinations insulaires en développement, et notamment dans celles qui, comme Anguilla, Saint-Barthélemy, Moustique, les îles Caïman, Turques-et-Caïques, Tobago dans la Caraïbe, l’île Maurice, les Seychelles, et les Maldives dans l’océan indien ont adopté un positionnement haut de gamme et une stratégie de luxe, et de ce fait restent en quelque sorte des « paradis » préservés des vols charters, des « nuisances » induites par l’effet de masse, et dont les niveaux de fréquentation et les capacités d’accueil sont volontairement réduits grâce à des critères financiers et avec l’appui d’arguments écologiques ? Le tourisme international bénéficie-t-il véritablement à ces petites économies insulaires ? Quelle est la relation réelle entre tourisme, croissance et développement économique dans ces microterritoires ? L’hypothèse de la croissance menée par le tourisme est-elle une option vérifiable pour la plupart d’entre eux ? Pour les principales institutions internationales, le tourisme constitue un important moteur de croissance pour les pays en développement, leur permettant de s’attaquer aux principaux défis d’aujourd’hui. Mais selon certaines critiques, une trop faible partie de la dépense touristique des visiteurs atteint ces pays insulaires en développement, le nombre de visiteurs dans ces pays s’accroît souvent plus rapidement que les recettes touristiques, principalement en raison de l’importance des « fuites », qui seraient selon la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement) de l’ordre de 80 % dans les Caraïbes. Si ces chiffres sont exacts, l’intérêt du tourisme au plan économique devient discutable pour ces petites destinations.
Pour s’en convaincre, Anguilla, petite destination touristique de luxe dans la Caraïbe nous servira d’exemple pour vérifier le bien-fondé ou non de ces critiques. Différents outils permettent de conceptualiser les liens entre tourisme et développement. Cependant, cette étude s’intéresse plus particulièrement à l’impact du tourisme sur le territoire, l’économie territoriale constitue l’outil théorique le plus pertinent pour s’interroger sur ces liens. À cet égard, différents travaux ont présenté dans un passé récent des analyses théoriques des conséquences positives ou négatives d’une croissance touristique dans les pays en développement (Copeland, 1991 ; Chen et Devereux, 1999 ; Hazari et Nowak, 2003 ; Hazari et Ng, 1993 ; Nowak et al., 2003). Ces contributions pour la plupart se réfèrent au concept de « syndrome hollandais » (dutch disease) et utilisent pour ce faire des modèles d’équilibre général. Ce concept est présenté en 1982 et en 1984 par Corden et Neary, qui distinguent deux effets possibles résultant d’une croissance exportatrice : un effet dépense et un effet mouvement de ressources.
Concernant l’effet dépense, ils considèrent qu’une croissance exportatrice est de nature à accroître le revenu local, ce qui induit une augmentation à la fois de la demande des « biens échangeables » et des « biens non échangeables ». Dans l’hypothèse de « petits pays », les prix des biens échangeables n’augmentent pas, car ils sont soumis à la concurrence internationale. En revanche, les prix relatifs des biens non échangeables par rapport aux biens échangeables augmentent, entraînant une appréciation du taux de change réel.
L’effet mouvement des ressources résulte d’une augmentation du produit marginal du travail dans le secteur en expansion, ce qui se traduit par un afflux de travail en provenance des autres secteurs. Cela dit, les études sur la relation entre développement touristique et croissance économique peuvent être réparties en trois groupes : la moitié de ces études utilise dans leur approche, l’analyse de régression ainsi que le test de causalité de Granger, notamment les travaux de Balaguer et Cantavella-Jorda (2002), Durbarry (2004), Dritsakis 2004), Oh (2005), Kim et al. (2006), Lee et Chang (2008), Brida et al. (2008), Chen et Chiou-Wei (2009), Tang et Jang (2009), Belloumi (2010), Lean et Tang (2010), Kasimati, 2011 ; Kreishan (2011), Tang (2011a, 2011b), Ridderstaat, Croes et Nijkamp (2013). Les variables touristiques utilisées dans ce type d’études ne furent pas toutes identiques. Par exemple, Oh (2005) a utilisé les recettes touristiques comme proxy de la spécialisation touristique, tandis que Kim et al. (2006) de même que Lean et Tang (2010) ont employé les arrivées touristiques comme variable de la concentration touristique. L’organisation mondiale du tourisme (OMT) indique qu’en période de crise, la relation entre les arrivées touristiques et les recettes touristiques est souvent faussée. Ces deux variables en raison de la conjoncture n’évoluent pas nécessairement dans le même sens. Les recettes touristiques sont dans ce cas souvent plus affectées que les arrivées touristiques (en cas de crise, on observe une tendance à la baisse dans les dépenses de consommation des visiteurs).
Rappelons que l’industrie touristique a été touchée dans le passé par diverses crises notamment par les conséquences de la crise asiatique (1997), par celles des attaques terroristes du 11 septembre 2001, et par celles de la crise financière mondiale de 2007-2010. Ces crises ont entraîné des divergences d’interprétation et de comparaison entre croissance des arrivées touristiques et croissance des recettes touristiques. Un autre problème de comparaison rencontré concerne le nombre et la fréquence des observations relatifs aux séries étudiées. Par exemple, Balaguer et Cantavella-Jorda (2002) ont utilisé dans leurs estimations des données trimestrielles sur la période 1975-1997, tandis que Tang (2011a) a employé des données mensuelles sur la période 1995-2009. Selon Otero et Smith, lorsque l’on recherche une relation d’équilibre à long terme, on devrait faire reposer les données sur une longue période de temps plutôt que sur un grand nombre d’observations collectées sur une courte période. Un second groupe d’études a utilisé dans leurs estimations, la technique de régression en données de panel notamment, en particulier, celles de Modeste(1994), Lanza et al. (2003), Eugenio-Martin et Martin Morales (2004), Lee et Chang (2008), Sequeira et Nunes (2008), Figini et Vici (2010), Amadou et Clerides (2010), Croes (2011), Du et Ng (2011). La plupart de ces études ont, dans leur conclusion confirmé l’hypothèse de la croissance tirée par le tourisme, à l’exception toutefois de celle de Lee et Chang (2008) qui a trouvé l’existence d’une relation réciproque entre tourisme et croissance économique. De plus, on constate que les deux tiers de ces études utilisent dans leurs estimations les données de la Banque mondiale (World Development Indicators). Or, beaucoup de ces données émanent des systèmes statistiques nationaux dont la qualité dépend de la manière dont ces systèmes sont conçus et fonctionnent. Certains pays par exemple utilisent différentes définitions et techniques de collecte des données, qui peuvent à leur tour avoir une influence sur la comparaison des résultats. Un troisième groupe d’études, comprenant celles de Ghali (1976), Gunduz et Hatemi (2005), Lee et Chien (2008), Katircioglu (2009) et Lean et Tang (2010) appliquent une méthode combinant les deux approches précédentes. Par exemple, Ghali (1976) a employé une méthode de type keynésien pour tester la relation entre développement touristique et croissance économique à Hawaii, tandis que Gunduz et Hatemi (2005) ont, dans le cas de la Turquie effectué un test de causalité, basé sur les techniques de simulation boostrap. Enfin, on constate que dans leurs estimations, plusieurs études n’utilisent pas les mêmes variables indépendantes pour déterminer l’incidence du tourisme sur la croissance économique. Par exemple, Gunduz et Hatemi (2005), Katircioglu (2009) et Lean et Tang (2010) utilisent les arrivées touristiques internationales comme principale variable indépendante de la croissance économique, tandis que pour Lee et Chien, ce sont les recettes touristiques.
Le reste du papier est organisé comme suit : la section 2 est consacrée à l’analyse du rôle potentiel du tourisme dans la croissance économique et la réduction de la pauvreté. La section 3 passe en revue les principaux ratios et indices permettant de déterminer la performance économique du tourisme à Anguilla. La section 4 aborde la spécification et l’estimation des deux modèles de régression : le modèle de la relation entre tourisme et croissance économique d’une part ; et le modèle de la relation entre tourisme et développement économique inclusif d’autre part. La section 5 présente la conclusion générale de l’étude et les implications politiques correspondantes.
1. Le rôle potentiel du tourisme dans la croissance économique et la réduction de la pauvreté
Le potentiel du tourisme en tant que facteur de développement local est souvent contesté, car cette activité est fortement consommatrice de produits importés et n’exercerait que des effets de liaison limités sur les producteurs locaux. Tel est le cas dans des microdestinations comme Anguilla, considérées comme des « enclaves touristiques », contrôlées par le capital étranger et les tours opérateurs qui n’entretiennent que des rapports restreints avec la société locale, sauf sous la forme de créations d’emplois non qualifiés.
Dans des destinations de dimension plus importante et notamment dans les pays développés, le tourisme est un secteur d’activité qui fait intervenir divers acteurs, allant des pouvoirs publics aux principaux protagonistes du secteur privé. Ces différents acteurs tissent entre eux des liens, en amont comme en aval, qui ont une influence sur la croissance et le développement économique. Selon la CNUCED (2013), la contribution du secteur du tourisme à la croissance économique, à la création d’emplois, au renforcement des capacités nationales et à la réduction de la pauvreté dépend des facteurs suivants :
-
La mesure dans laquelle le secteur du tourisme est intégré dans l’économie nationale du fait de ses relations en amont et en aval avec d’autres secteurs et de son intégration dans les chaînes de valeur régionales et mondiales ;
-
La mesure dans laquelle les revenus provenant du tourisme, y compris les devises, sont utilisés pour financer le développement de l’infrastructure, soutenir les entreprises locales, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME), et développer les compétences et les institutions nécessaires pour créer une économie locale dynamique ;
-
Les politiques et stratégies adoptées par les pouvoirs publics et la mesure dans lesquelles celles-ci incitent à accroître les investissements nationaux et étrangers dans le tourisme et à procéder à des transferts de technologie et de savoir-faire, favorisant ainsi les activités de main-d’œuvre, et visant les régions dans lesquelles vit et travaille une population pauvre ;
-
Les efforts nationaux pour faire en sorte que les activités touristiques soient exercées de manière durable et répondent à des objectifs économiques, sociaux et environnementaux.
Dès lors, ces facteurs génèrent une croissance qualifiée d’inclusive qui constitue une approche relativement nouvelle, destinée à accroître les bénéfices économiques des destinations et réduire les fuites économiques ; cette démarche partage certains principes d’un tourisme pro-pauvre. Ce concept de croissance inclusive, en mettant l’accent sur les aspects économiques et sociaux, diffère quelque peu du développement durable qui repose sur trois piliers (l’environnement, l’économie et la société). Cependant, au niveau national, la croissance inclusive fonctionne parfaitement en parallèle avec les principes du développement durable.
En bref, une des caractéristiques importantes du tourisme est sa capacité à établir des relations fortes et diverses avec les autres secteurs d’activité. Cependant, établir des liens ne peut se faire sans stratégie régionale ou nationale efficace, comprenant des politiques ciblées, des cadres réglementaires et institutionnels, et des incitations suffisantes pour stimuler l’investissement privé et le renforcement des capacités nationales dans le domaine de l’offre.
Or, dans de nombreux pays en développement, les relations au tourisme restent ténues et sous-exploitées. Par conséquent, les investisseurs étrangers, les voyagistes internationaux et les compagnies aériennes étrangères ont tendance à accaparer la plus grande partie de la valeur ajoutée dans le secteur du tourisme, dont les pauvres ne tirent qu’un profit limité. D’où la préoccupation au sujet des fuites et d’autres composantes entrant dans la performance économique du tourisme, analysée dans la section suivante.
2. La performance économique du tourisme à Anguilla
D’une superficie de 102 km2 et peuplée aujourd’hui de 16 000 habitants, Anguilla est, après Monserrat, l’île la moins peuplée des pays membres de l’organisation des états de la Caraïbe orientale (OECO). En revanche, le revenu par habitant de ce microterritoire est supérieur à celui des autres pays de cette sous-région. Son potentiel de diversification économique et de croissance est limité, à cause de l’exiguïté de sa superficie, et de la petitesse de sa population. Par conséquent, cette île dépend étroitement des importations pour répondre aux demandes matérielles du secteur touristique. Beauté naturelle, plages de rêve, hôtellerie de luxe, inaccessibilité relative, et stabilité politique font de ce petit territoire Britannique de la Caraïbe une destination touristique haut de gamme. Possédant peu de ressources naturelles, son économie se concentre essentiellement sur le tourisme de luxe, la banque offshore, l’immobilier, et la pêche aux langoustes. Dans ces conditions, le tourisme constitue le principal pourvoyeur de devises de l’île. Les recettes touristiques d’Anguilla couvrent plus de la moitié de son PIB et procurent les deux tiers des emplois. Sur la période 1990-2013, le taux de croissance annuel moyen des recettes touristiques à Anguilla a été de 5 % tandis que le nombre de touristes de séjour a progressé en moyenne annuelle de 3 %. Par conséquent, l’élasticité des recettes touristiques par rapport à la fréquentation de séjour s’est élevée durant cette période à 1,7. Cela signifie que les recettes touristiques à Anguilla ont augmenté proportionnellement plus rapidement que le nombre de touristes de séjour. Néanmoins, en dépit de l’importance des flux financiers qui traversent ce territoire, la part des revenus qui contribue véritablement au développement de cette île est considérée comme insuffisante. Plusieurs raisons expliquent la faiblesse de l’effet d’entraînement attendu : tout d’abord, l’importance du séjour tout-compris, principalement conçu et acheté dans les pays émetteurs ; la part la plus confortable des revenus appartient à ceux qui contrôlent alors le marché, sans oublier l’importance des capitaux étrangers dans la région et les enjeux autour de l’approvisionnement des lieux. Par conséquent, il est nécessaire de prendre en compte ces différents facteurs pour déterminer de manière pertinente le rôle exact du tourisme dans l’économie de ce territoire. Aussi, la performance économique de ce secteur est appréhendée ci-dessous à l’aide de plusieurs paramètres, notamment par l’application du concept PDT (performance du tourisme) exprimé à l’aide d’un tableau, intégrant divers indicateurs et ratios économiques et touristiques.
2.1. Application du concept de performance du tourisme (PDT) à Anguilla
Le concept de performance du tourisme (PDT) est souvent utilisé pour évaluer et comparer la performance économique du tourisme entre destinations. Les recettes directes du tourisme ne donnant qu’une idée partielle de la contribution du tourisme au revenu national, certains auteurs comme Singh et Jayawardena (2003) ainsi que le World Travel & Tourism Council (2013) proposent un tableau relativement complet dans lequel figurent les principaux ratios et indices destinés à apprécier le niveau de performance économique du tourisme. Pour illustrer le PDT d’Anguilla, nous présentons ci-dessous deux tableaux : l’un extrait du rapport 2013 de la WTTC qui affiche les principales contributions économiques du tourisme à Anguilla, et l’autre qui présente une synthèse, intégrant données de fréquentation, recettes touristiques brutes, niveau de fuites, recettes touristiques nettes par habitant d’Anguilla par rapport aux autres destinations touristiques de l’OECO.
Ce tableau présente six grands indicateurs ou ratios (exprimés en %) : la contribution directe du tourisme au PIB, la contribution totale du tourisme au PIB, la contribution directe du tourisme à la création d’emplois, la contribution totale du tourisme à la création d’emplois, la part des investissements touristiques dans le total des investissements, le ratio dépenses touristiques/exportations totales. Il convient de souligner que la contribution directe du tourisme au PIB exprime la dépense initiale effectuée par les visiteurs à l’intérieur du pays, notamment dans les hôtels, restaurants, agences de voyages, compagnies de transport, de même que la dépense publique — dépense liée au tourisme, effectuée par les gouvernements dans des secteurs comme la culture (par exemple les musées) ou les loisirs (tels les parcs nationaux).
Toutes ces dépenses sont évaluées par rapport au PIB. En revanche, la contribution totale du tourisme au PIB renferme des impacts plus larges sur l’économie (impacts indirects et induits). Les impacts indirects sont engendrés notamment par les dépenses d’investissement telles que les achats de nouveaux avions ainsi que la construction de nouveaux hôtels, sans oublier les dépenses publiques qui soutiennent l’activité touristique au sens large tel que les dépenses de marketing et de promotion, les dépenses de sécurité, etc. À cela, il faut ajouter les dépenses locales en biens et services en lien avec l’activité touristique, telles que les achats effectués localement en aliments et boissons par les hôtels pour reconstituer leurs stocks. Quant aux impacts induits, ils résultent des impacts directs et indirects précédents. L’accroissement de la consommation locale découlant de nouveaux revenus distribués dans le tourisme en est un exemple.
Il ressort de ce tableau qu’Anguilla est l’une des destinations qui, au plan mondial, dépend le plus du secteur touristique pour sa survie économique, puisque les dépenses touristiques représentaient en 2012 jusqu’à 86,4 % du total de ses exportations contre 14,1 % à l’échelon mondial. De plus, le tourisme procure 68,1 % du total des emplois contre 13 % au niveau mondial.
En outre, très souvent, le succès d’une destination est jugé sur la base de la croissance des visiteurs accueillis, de celle du nombre moyen de nuitées effectuées sur place ou de la dépense touristique brute. Or, la plupart des travaux sur ce thème considèrent que la performance touristique d’une destination est mieux appréhendée lorsqu’elle s’effectue sous l’angle des recettes touristiques nettes par habitant. Ces dernières représentent la part des recettes qui reste dans l’économie locale lorsque, des recettes brutes, on soustrait les diverses fuites (importations dérivées, rapatriement de bénéfices, dépenses de promotion à l’étranger, etc.,). Par conséquent, le raisonnement en matière de performance touristique devient plus crédible par la prise en compte à la fois de ces fuites ainsi que du nombre d’habitants. De ce fait, les petits états ou microterritoires avec de faibles niveaux de population ont tendance à enregistrer des recettes par habitant plus élevées que celles de pays de taille démographique plus importante. Par conséquent, l’approche en matière de recettes touristiques nettes par habitant est adoptée dans le tableau ci-dessous pour déterminer, à l’aide du concept PDT, le niveau de performance touristique d’Anguilla par rapport aux autres destinations touristiques de l’OECO (à l’exception toutefois de Montserrat pour lequel nous ne disposons pas de données suffisamment fiables).
Tableau 2. Performance touristique d’Anguilla en 2012 par rapport aux autres destinations de l’OECO :
Anguilla |
Antigua-et-Barduda |
Dominique |
Grenade |
Sainte-Lucie |
Saint-Kitts —et-Nevis |
St-Vincent – et-les — Grenadines |
|
Nombre de touristes de séjour |
64 698 |
246 926 |
85 980 |
112 335 |
306 801 |
104 240 |
74 364 |
Durée moyenne des séjours |
8,0 |
7,3 |
10,5 |
8,4 |
8,8 |
9,6 |
11,7 |
Nombre total de nuitées |
517 584 |
1 802 560 |
902 790 |
943 614 |
2 699 849 |
1 000 704 |
870 059 |
Dépenses touristiques par visiteur (en EC$) |
4 707 |
3 488 |
2 390 |
2 922 |
2 968 |
2 461 |
3 418 |
Dépenses par nuitée (en EC$) |
588 |
478 |
228 |
348 |
337 |
256 |
292 |
Recettes touristiques brutes (en milliers d’EC$) |
304 520 |
861 300 |
205 540 |
328 270 |
910 650 |
256 510 |
254 200 |
Taux de fuite (%) |
66 |
56 |
45 |
55 |
62 |
60 |
33 |
Recettes touristiques nettes (en milliers d’EC$) |
103 536,8 |
378 972 |
113 047 |
147 721,5 |
346 047 |
102 604 |
170 314 |
Recettes touristiques nettes par habitant (en EC$) |
6 471 |
4 253 |
1 570 |
1 331 |
2 012 |
2 000 |
1 686 |
Classement |
1 |
2 |
6 |
7 |
3 |
4 |
5 |
Source : Banque centrale de l’OECO et calculs de l’auteur.
Ce tableau montre clairement que Anguilla, avec une recette touristique nette par habitant de 6471 EC$ (soit 2388 $ US) en 2012, est la destination touristique de l’OECO qui affiche la meilleure performance touristique de cette sous-région, suivie d’Antigua-et-Barbuda, Sainte-Lucie et Saint-Kitts-et-Nevis. Cependant, on observe également qu’Anguilla avec un ratio de 4 touristes de séjour par habitant est la destination de l’OECO qui présente la densité touristique la plus élevée, contre un ratio de 2,7 à Antigua-et-Barbuda, 1,7 à Sainte-Lucie, 2 à Saint-Kitts-et-Nevis et 1 à Grenade. Selon l’OMT, un touriste par habitant serait le seuil de fréquentation à ne pas dépasser pour éviter les différentes pressions et nuisances, notamment sur l’environnement, le foncier et le niveau des prix domestiques. De plus, un tel seuil de fréquentation à Anguilla peut à terme avoir une incidence néfaste sur la capacité de charge de cette destination, capacité au-delà de laquelle les équipements sont saturés (capacité physique), l’environnement dégradé (capacité environnementale), le plaisir du visiteur diminué (capacité psychologique). La capacité de charge est donc un ratio de densité touristique à ne pas dépasser. Elle s’exprime quelquefois par le nombre de visiteurs-jour au Km2 reçus dans la destination. Whitehall et Craigwell (2005) l’ont évalué à 481 touristes/jour au km2 à Anguilla contre 1 260 à la Barbade, 3 836 à Aruba, 5 952 aux Bermudes, et 12 714(!) à Sint-Maarten. Outre ce ratio de densité à ne pas dépasser, il faut ajouter les conséquences négatives possibles que le changement climatique peut provoquer dans le futur sur les ressources touristiques de l’île et donc sur son attractivité. On pense en particulier à l’accroissement de l’activité cyclonique et à l’érosion de la biodiversité, au manque d’eau, au blanchissement des coraux, à la destruction de plages, à l’élévation du niveau de la mer, à l’augmentation de maladies tropicales et en définitive à une réduction du nombre de visiteurs et des recettes touristiques correspondantes. Par conséquent, la performance économique future du tourisme à Anguilla risque d’être affectée par de tels évènements si, d’une part, les principes du développement durable ne sont pas suivis (développement économiquement viable, écologiquement soutenable et humainement acceptable) et, d’autre part, si des plans d’urgence ne sont pas mis en œuvre pour prévenir le changement climatique, ce que les experts appellent « mitigation » plutôt que de pallier ses effets.
2.2. Évaluation des « fuites » et du contenu en importation de l’activité touristique
Pour comprendre pourquoi le tourisme est quelquefois décrié et jugé comme un exemple de domination des pays du nord sur les pays du sud, il est nécessaire d’évaluer et d’analyser à l’aide d’un indicateur précis, l’importance des fuites que provoque cette activité dans certaines destinations touristiques. De toute évidence, un tel indicateur est important, car il permet de mesurer l’influence réelle du tourisme sur le développement. Cet indicateur ou taux de fuite montre dans quelle proportion l’économie locale est en mesure de conserver sur place les recettes du tourisme. Cette évaluation est d’autant plus importante que le risque est grand de voir l’expansion du tourisme se traduire par une baisse du bien-être des résidents, dès lors que la part des bénéfices distribués aux non-résidents est supérieure aux dépenses effectuées par les visiteurs. Le taux de fuite de l’activité touristique à Anguilla est évalué ci-après, puis comparé à celui des autres destinations de la Caraïbe. Rappelons que l’essentiel de ces fuites est dû à :
-
l’importation de matériaux et d’équipements pour la construction destinée à l’activité touristique ;
-
l’importation de biens de consommation, en particulier de produits alimentaires et de boissons pour le même objet ;
-
le rapatriement de bénéfices réalisés dans le secteur du tourisme par les investisseurs étrangers ;
-
les dépenses de marketing et de promotion des organismes nationaux de tourisme à l’étranger ;
-
l’amortissement de la dette extérieure contractée lors de la construction des hôtels et des stations touristiques.
L’impact de ces fuites varie grandement d’un pays à l’autre, suivant leur capacité à produire les biens et services nécessaires à l’industrie du tourisme. Les estimations disponibles montrent que ce sont les économies les plus petites qui enregistrent les fuites les plus importantes.
Pour évaluer l’importance de ces fuites à Anguilla, nous allons utiliser l’approche de Singh (2006) : pour déterminer le taux de fuite, cet auteur emploie l’équation suivante :
Recette touristique retenue localement (en %) = (contribution du tourisme au PIB/recette touristique)*100 ;
d’où :
Taux de fuites = [1 – (contribution du tourisme au PIB/recette touristique)*100]
En appliquant cette formule aux données du tableau suivant, il nous est possible de déterminer le taux de fuites résultant de l’activité touristique à Anguilla.
Tableau 3. Anguilla : la contribution du tourisme au PIB et le taux de fuite
Contribution du tourisme au PIB |
PIB en 2002 |
Contribution actuelle au PIB |
Recette touristique |
Recette touristique retenue localement |
Taux de fuites |
58 % |
37 545 126 $ US |
21 776 173 $ US |
63 504 000 $ US |
34 % |
66 % |
Source : Singh (2006)
En remplaçant les lettres par leur valeur, on obtient le taux de fuites suivant pour Anguilla :
[1 – (21 776 173/63 504 000)*100] = (1 – 0,34)*100 = 66 %
Soit un taux de fuites à Anguilla de 66 %, et donc un taux de recette touristique retenu localement de 34 %. En utilisant la même formule, l’auteur évalue et compare le taux de fuites d’autres destinations touristiques du monde par rapport à Anguilla. Le tableau suivant montre qu’Anguilla est, après les Bahamas, la destination qui affiche le taux de fuites le plus élevé de cet échantillon.
Tableau 4. Taux de fuites dans quelques destinations touristiques
Pays |
Taux de fuites |
Anguilla |
66 % |
Antigua-et-Barbuda |
56 % |
Barbade |
66 % |
Bahamas |
85 % |
Bermudes |
59 % |
Îles Caïman |
65 % |
Dominique |
45 % |
Les îles Fiji |
56 % |
Grenade |
55 % |
Jamaïque |
50 % |
Maurice |
43 % |
Nouvelle-Zélande |
12 % |
Seychelles |
30 % |
Sainte-Lucie |
62 % |
Saint-Kitts-et-Nevis |
60 % |
Saint-Vincent-et-les-Grenadines |
33 % |
Turques-et-Caïques |
60 % |
Trinité-et-Tobago |
22 % |
Îles Vierges américaines |
35 % |
Source : Singh, D.H.R. 200
2.3. Évaluation de la performance compétitive du tourisme à Anguilla par rapport aux autres destinations touristiques de la Caraïbew
Le développement du tourisme est étroitement lié à l’attractivité et à la compétitivité des destinations. Aussi, pour assurer le succès d’une destination, deux paramètres importants doivent être pris en compte : compétitivité et durabilité. Ces deux paramètres se soutiennent mutuellement. La compétitivité touristique désigne alors la capacité d’une destination à faire face à la concurrence de manière efficace et rentable sur le marché touristique, et découle de son aptitude à préserver la qualité de ses ressources physique, sociale, culturelle et environnementale, tout en restant compétitif sur le marché. En nous basant sur ce principe, nous allons dans cette section, évaluer à l’aide d’un indice synthétique, la performance compétitive du tourisme à Anguilla par rapport aux autres destinations touristiques de la Caraïbe. Pour ce faire, on appliquera la méthodologie utilisée par R. Croes (2011) qui a évalué à l’aide d’un modèle de régression sur données de panel, l’indice de compétitivité touristique de quinze pays de la Caraïbe (y compris Anguilla). Croes a employé trois variables pour déterminer l’indice de compétitivité touristique : la dépense touristique moyenne par habitant, le taux de croissance de la dépense touristique, et la valeur ajoutée du tourisme dans l’économie. Ces trois variables ont été affectées respectivement des pondérations suivantes : 40 %, 30 %, et 30 %. L’indice ainsi calculé figure sur une échelle de 0 à 1. Par conséquent, les destinations touristiques les plus compétitives sont celles qui réalisent les plus forts indices. Le tableau suivant présente les résultats de cette évaluation.
Tableau 5. Indice de compétitivité touristique d’Anguilla par rapport aux autres destinations de la Caraïbe.
Source : Croes. R Journal of Travel Research (Juin 2011)
Ainsi, avec un indice de compétitivité touristique de 0,639, Anguilla se classe à la troisième place des destinations touristiques les plus compétitives de notre échantillon, après Aruba (0,752) et les Îles Vierges britanniques (0,751).
2.4. Indice « d’une semaine de vacances à la plage »
À l’exemple de l’indice Big Mac utilisé en 1986 par le magazine The Economistpour expliquer la notion de parité de pouvoir d’achat (PPA), le FMI, dans une récente étude (décembre 2014) s’est inspiré de ce concept pour déterminer et comparer en 2014, le coût ou la valeur indiciaire d’une semaine de vacances dans 16 destinations touristiques de la Caraïbe dont les recettes touristiques dépassent 8 % de leur PIB. Il s’agit d’Anguilla (37 %), Antigua-et-Barbuda (26 %), les Bahamas (27 %), la Barbade (24 %), Belize (19 %), la Dominique (20 %), la République dominicaine (8 %), la Grenade (14 %), la Jamaïque (15 %), St-Kitts-et-Nevis (13 %), Sainte-Lucie (25 %), Saint-Vincent-et-les-Grenadines (13 %). Ont été exclus de l’échantillon : Guyana (4 %), Haïti (3 %), Suriname (1 %) et Trinidad et Tobago (2 %). L’évaluation de cet indice est basée sur un panier de biens et services offerts sur place et dont les prix sont constitués de : (i) le tarif moyen d’une chambre dans les hôtels 3 étoiles déterminé à partir d’une source commune (ici Travelocity) ; (ii) le prix de trois repas quotidiens dont deux à prix modique et un à prix moyen (source : Numbeo), (iii) le tarif moyen des taxis pour un transport entre l’hôtel et l’aéroport (source : Worldcabfare) ; (iv) le prix de deux litres d’eau, d’une bière importée et d’une tasse de café par jour (source : Numbeo). En raison des caractéristiques des destinations en question, une distinction est établie entre destinations haut de gamme et destinations low-cost. Deux critères ont été utilisés pour ce faire : le nombre d’hôtels classés 4-5 étoiles en pourcentage du parc hôtelier global, et le PIB par habitant. Ces deux critères reflètent la capacité des pays hôtes à fournir les équipements et les services requis aux visiteurs notamment à ceux les plus fortunés.
La formule suivante a été employée pour le calcul de l’indice :
Coût d’une semaine de vacances à la plage = 7*(hôtel 3 étoiles)+2*(tarif de taxi de l’hôtel à l’aéroport)+7*(2 repas à tarif réduit + 1 repas à tarif moyen) + 7*2 litres d’eau + 7*0,3 bouteille de bière importée + 7*tasse de café).
Afin de pouvoir évaluer cet indice, les Bahamas ont été choisis, en termes de coût et donc d’indice comme destination de base (indice=100). D’une part, le calcul de l’indice montre que les destinations haut de gamme dans lesquelles les hôtels 4-5 étoiles représentent au moins 30 % de leur capacité d’accueil sont : Anguilla, les Bahamas, la Barbade, et Saint-Kitts-et-Nevis, le reste étant composé de destinations low-cost. D’autre part, ce calcul révèle que les coûts d’une semaine de vacances dans les destinations-plage de la Caraïbe (dont Anguilla) sont en moyenne plus élevés que dans celles des autres régions du monde comme les Seychelles, les Maldives, Fidji ou les destinations méditerranéennes de l’Europe (Portugal, Espagne, Italie, Grèce). L’indice s’élève à 79 pour le groupe d’iles de la Caraïbe contre 40 pour les autres régions du monde. La figure ci-dessous reproduit à titre d’illustration la valeur de l’indice pour une semaine de vacances effectuée dans les destinations-plage caribéennes par rapport à celles des autres destinations-plage du monde.
Cette section comporte au plan méthodologique les étapes suivantes : d’une part, la spécification du modèle de la relation entre tourisme et croissance économique, et la spécification du modèle de la relation entre tourisme et développement économique inclusif. D’autre part, l’estimation des deux modèles précédents avec les tests de racine unitaire ; les tests de cointégration ; le modèle vectoriel à correction d’erreur et les tests de causalité de Granger.
3.1. Spécification du modèle de la relation entre tourisme et croissance économique
Pour apprécier les relations qui existent entre l’activité touristique et la croissance économique à Anguilla, nous allons spécifier le modèle de la relation entre ces deux variables. Le modèle comprend donc deux variables : le PIB réel par habitant (Y), proxy de la croissance économique, et le ratio des recettes touristiques réelles au PIB (DT), proxy du développement touristique. Les données sont annuelles et sont fournies par la Banque centrale des états de la Caraïbe orientale (OECO), elles couvrent la période 1985-2012 et sont exprimées en dollars de la Caraïbe orientale (EC$).
En termes économétriques, l’équation s’exprime comme suit :
logY = α0 + α1logDT + ε
Y et DT sont exprimés en logarithme naturel, par conséquent leurs coefficients sont considérés comme des élasticités. ε Représente le terme d’erreur. Ensuite, nous estimerons le modèle à correction d’erreur, après avoir dans un premier temps effectué les tests de diagnostic sur les données annuelles (stationnarité et cointégration), et ce, à l’aide de la version 8 du logiciel Eviews. Pour finir, nous utiliserons les tests de causalité de Granger pour déterminer la direction de la causalité entre les deux variables.
3.2. Spécification du modèle de la relation entre tourisme et développement économique inclusif
Ce modèle a pour but de vérifier si la croissance du secteur touristique à Anguilla a une influence sur les autres secteurs d’activité. L’approche de Feder (1982) et de Ram (1986) est employée à cet effet afin de tester, à l’aide d’un modèle de régression, la nature des liens à court terme et à long terme entre le secteur touristique et l’agriculture ainsi qu’avec le secteur manufacturier et les autres activités de services. Pour ce faire, on part de l’hypothèse que l’économie est divisée en deux secteurs : le secteur touristique (T) et le secteur non touristique (N). Dans le secteur touristique, le revenu dépend des intrants en main-d’œuvre et en capital, tandis que dans le secteur non touristique, il dépend indépendamment de ces deux intrants de l’activité touristique elle-même. Dans les deux cas, les fonctions de production s’expriment comme suit :
(1) T = G (Kt, Lt)
(2) N = F (Kn, Ln, T)
Où
T = production touristique, N = production non touristique, Kn, Kt = représentent respectivement le stock de capital des secteurs non touristique et touristique, et Ln, Lt = expriment respectivement la population active dans les secteurs non touristique et touristique.
Le montant total des intrants s’exprime comme suit :
(3) Kn + Kt = K
(4) Ln + Lt = L
Dans ces conditions, la production totale (Y) correspond à la somme de la production du secteur touristique et de celle du secteur non touristique, si bien que :
(5) Y = N + T
En conséquence, les variations de la production (Y) s’interprètent comme des variations à la fois de la production touristique et de la production non touristique.
Compte tenu des externalités générées dans le secteur touristique, on pose l’hypothèse que les productivités relatives dans les deux secteurs sont supérieures à l’unité, en d’autres termes :
(6) (Gk/Fk) = (Gt/Ft) = 1 + σ
Les indices expriment les dérivées partielles de la fonction par rapport à l’intrant correspondant. Après arrangements des équations (3) à (6), l’équation de la croissance devient :
(7) Y = α0L + α1K + α2T
Le point situé sur chaque variable est l’expression d’un taux de croissance. Pour déterminer l’impact de la croissance du tourisme sur le développement économique, cette étude suit l’approche de Salvatore et Hatcher, en divisant l’équation (7) par la population active. Dans ce cas, nous avons fait figurer deux points sur chacune des variables afin de distinguer l’équation (8) de l’équation (7). L’équation (8) s’exprime alors comme suit :
(8) Y = α0 + α1K + α2T
Y = la croissance du revenu réel par habitant
K = la croissance par tête du capital
T = la croissance par tête de la production touristique
En définitive, l’équation (8) signifie que la croissance du revenu par habitant découle de la croissance par tête du capital et de la croissance par tête de la production touristique.
Enfin, l’étude analyse à l’aide d’un modèle à correction d’erreur la nature de la relation entre la croissance à court terme et la croissance à long terme du secteur touristique et celle des autres secteurs de l’économie. Ce modèle s’exprime alors comme suit :
(9) Yt = ao + a1Xt + Ut
et
(10) ΔYt = bo + b1ΔXt + b2ΔX(-1) + b3ΔY(-1) + b4Ư(-1) + εt
où
Yt = logarithme de la part d’un secteur donné dans le PIB ;
Xt = logarithme de la part de la production touristique dans le PIB ;
Δ = variation
Ut et εt = termes d’erreur
3.3. Estimation du modèle de la relation entre tourisme et croissance économique
Pour étudier la relation de cause à effet entre développement touristique et croissance économique, nous allons utiliser l’analyse de cointégration et le modèle à correction d’erreur. La méthodologie adoptée est une approche en trois étapes : la première étape consiste à vérifier les propriétés des séries chronologiques (stationnarité et ordre d’intégration) de la croissance économique et du développement touristique, et ce, à l’aide des tests de racine unitaire de Dickey-Fuller et de Phillips-Perron. La deuxième étape utilise la théorie de la cointégration d’Engle et Granger pour examiner les relations de long terme entre le développement touristique et la croissance économique. Enfin, dans la troisième étape, les tests de causalité de Granger sont utilisés dans le cadre d’un modèle à correction d’erreur pour déterminer la direction de la causalité entre le développement touristique et la croissance économique.
3.3.1. Première étape : les tests de racine unitaire
Ces tests permettent d’identifier la présence de racine unitaire dans une série. Une série chronologique est stationnaire si elle ne comporte ni tendance ni saisonnalité. Les tests de Dickey-Fuller et de Phillips-Perron sont employés à cette fin. Dans ces deux tests, on cherche à vérifier l’hypothèse nulle contre l’hypothèse alternative.
Les tests de stationnarité (ADF et PP) consignés dans le tableau ci-dessous indiquent qu’en niveau, aucun retard n’est significatif, et que les différences premières de ces séries sont toutes stationnaires. Ces variables sont donc intégrées d’ordre un, I(1), ce qui nous permettra de vérifier s’il existe une relation de cointégration entre elles.
Tableau 6. Résultats des tests de Dickey-Fuller et de Phillips-Perron
LDT |
Nombre de retards |
LY |
Nombre de retards |
|
Niveau |
||||
ADF |
-27 295* |
1 |
-33 397* |
1 |
PP |
-25 471* |
1 |
-26 807* |
1 |
Différence première |
||||
ADF |
-42 776* |
0 |
-21 503* |
2 |
PP |
-42 776* |
0 |
-17 988** |
2 |
*= seuil de 5 % ; **= seuil de 10 %
3.3.2. Deuxième étape : le test de cointégration
Le test de cointégration est effectué à partir du résidu d’estimation du modèle :
Yt = a1 Xt + a0 + εt
Soit : LY = 0,60*LDT + 0.035 + e
Par conséquent, l’équation d’équilibre à long terme indique qu’un accroissement de 1 % de la dépense touristique devrait se traduire, toutes choses égales par ailleurs, par une augmentation du PIB de 0,6 %.
Par ailleurs, nous pouvons vérifier que le résidu est bien stationnaire, il existe donc un risque de cointégration entre les deux variables.
Variable |
Coefficient |
Std. Error |
t-Statistic |
Prob. |
E(-1) |
-0,428 949 |
0,209 746 |
-20 450 |
0,055 7 |
3.3.3. Troisième étape : le modèle à correction d’erreur et le test de causalité de Granger
Nous procédons donc maintenant à l’estimation du modèle à correction d’erreur. Nous calculons d’abord le résidu (provenant du modèle précédent) décalé d’une période, puis nous estimons (par les MCO) le modèle :
D(Y) = α1*D(Xt) + α2*e(-1) + ε
Soit : D(LY) = 0,747*D(LDT) — 0,031*e(-1) + ε
(0,15)
Le coefficient (terme de rappel) de e(-1) est bien significativement négatif, la représentation à correction d’erreur est validée. Nous pouvons donc effectuer les tests de causalité de Granger.
Les tests de causalité de Granger : au niveau théorique, la mise en évidence de relations causales entre les variables économiques fournit des éléments de réflexion propices à une meilleure compréhension des phénomènes économiques ; connaître le sens de la causalité est aussi important que de mettre en évidence une liaison entre des variables économiques. Granger a proposé les concepts de causalité et d’exogénéité : la variable Y est la cause de DT, si la prédictibilité de DT est améliorée lorsque l’information relative à Y est incorporée dans l’analyse. Le tableau ci-dessous a pour but d’indiquer la direction de la causalité au sens de Granger entre LDT et LY.
Les résultats montrent l’existence à Anguilla d’une causalité bidirectionnelle entre dépenses touristiques et croissance économique.
Tableau 7. Tests de causalité de Granger
Null Hypothesis: |
Obs |
F-Statistic |
Prob. |
LDT does not Granger Cause LY |
18 |
9,18696 |
0,0033 |
LY does not Granger Cause LDT |
6,25457 |
0,0125 |
3.4. Estimation du modèle de la relation entre tourisme et développement économique inclusif
Pour évaluer empiriquement l’importance de la relation entre la croissance du tourisme et le reste de l’économie, nous nous sommes inspirés des travaux de Modeste (1994) qui a utilisé dans un cadre de cointégration, un modèle à correction d’erreur sur des données de panel relatives à trois pays : Anguilla, la Barbade, et Antigua-et-Barduda. Dans cet exercice, les séries X et Y de chaque pays sont stationnaires en différence première. Aussi, on admet que ces séries sont intégrées d’ordre un, I(1). Cependant, les variables dans les équations relatives au secteur manufacturier et à celui des services n’étant pas cointégrées, seules les estimations pour le secteur agricole (Xt) seront prises en compte. Pour estimer les paramètres dans le modèle à correction d’erreur, la procédure en deux étapes d’Engle-Granger est appliquée. Dans la première étape, l’équation (9) est estimée. Les résidus sont calculés et testés pour la stationnarité. Dans la deuxième étape, l’équation à court terme de la production sectorielle est estimée avec les résidus.
Les estimations à long terme et à court terme des équations de production sectorielle sont présentées dans le tableau 8.
Tableau 8. Résultats du modèle à correction d’erreur*
Variables |
À : estimation de la relation de long terme |
Terme constant |
7 363 |
Xt |
-1,645 |
R2 ajusté |
0,938 |
B : estimation de la relation de court terme |
|
Terme constant |
-0,028 (-2 034) |
ΔXt |
-1,063 (5 061) |
ΔX(-1) |
0,325 (1,525) |
ΔY(-1) |
0,106 (0,523) |
U(-1) |
-0,843 (-4 065) |
*Les nombres figurant entre parenthèses expriment les t-statistics.
Source : Modeste (1994)
Ces estimations montrent qu’à long terme comme à court terme, l’accroissement du secteur touristique s’accompagne par une contraction du secteur agricole (-1,645 et -1,063). Elles montrent également que le terme de rappel de U(-1) possède le signe attendu, par conséquent le modèle à correction d’erreur est validé.
Enfin, le tableau 9 suivant présente les coefficients de corrélation entre les principaux secteurs de l’économie à Anguilla ainsi que les t-statistics correspondants. Selon ces résultats, tous les coefficients de corrélation affichés sont statistiquement significatifs, à l’exception de trois d’entre eux. Ils montrent qu’avec un coefficient de -0,73, la production touristique à Anguilla est corrélée négativement à la production agricole. De même, avec un coefficient de -0,94, la production touristique dans ce territoire est corrélée négativement à la production de services.
Tableau 9. Coefficients de corrélation entre les principaux secteurs de l’économie à Anguilla, Barbade, et Antigua-et-Barbuda*
Corrélation entre : |
Barbade |
Antigua et Barduda |
Anguilla |
Production agricole et production touristique |
-0,76* (-3,87) |
-0,89* (6,47) |
-0,73* (-2,74) |
Production manufacturière et production touristique |
-0,52* (-2,01) |
-0,51* (-1,96) |
0,07 (0,18) |
Production de services et production touristique |
0,09 (0,29) |
0,09 (0,29) |
-0,94* (-7,28) |
* Les données figurant entre parenthèses sont les t-statistics. Les astérisques indiquent que les valeurs sont statistiquement significatives au seuil de 5 %.
Source : Modeste (1994)
Conclusion et implications politiques
La présente étude s’est efforcée d’explorer les relations complexes entre le tourisme et la problématique du développement local dans les petites destinations touristiques de luxe. Le but étant d’évaluer l’impact du tourisme sur les différentes dimensions du développement, en tentant d’appréhender les différentes facettes des liaisons entre tourisme, croissance économique et développement inclusifs. Anguilla, petite destination touristique de luxe de la Caraïbe a été choisie comme étude de cas pour un tel exercice. Pour ce faire, on s’est fixé deux objectifs : en premier lieu, vérifier si l’hypothèse de la croissance tirée par le tourisme est une option concevable à Anguilla. En second lieu, vérifier également si l’activité touristique exerce un impact positif sur le développement économique inclusif dans ce microterritoire. À cet effet, deux modèles de régression ont été employés successivement, dans un cadre de cointégration : le premier est un modèle qui analyse la relation entre dépense touristique et croissance économique, et le second entre activité touristique et développement économique inclusif.
Deux enseignements majeurs ressortent de l’étude : d’une part, les résultats montrent que la croissance économique et l’activité touristique à Anguilla sont reliées à long terme. Cette relation se caractérise par un impact positif du tourisme sur la croissance économique de long terme, avec une élasticité de 0,6, et par l’existence, au sens de Granger d’une causalité bidirectionnelle entre dépense touristique et croissance économique, confirmant ainsi l’hypothèse de la croissance menée par le tourisme à Anguilla. D’autre part, ces résultats révèlent que la croissance du secteur touristique s’accompagne par une contraction de l’activité agricole à Anguilla, contraction qui se traduit par une perte de ressources pour le pays, et par un accroissement des « fuites » liées aux importations dérivées. En conséquence, le potentiel du tourisme en tant que facteur de développement économique inclusif devient une hypothèse irrecevable dans le cas de ce petit territoire, et ce, en raison des effets multiplicateurs et de liaison limités sur les producteurs locaux.
Source: Etudes Caribéennes
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